PRESENTATION AU PROCUREUR DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE

Mr Luis Moreno Ocampo,

CONCERNANT DES VIOLATIONS ET DES CRIMES COMMIS PAR LES RESPONSABLES ISRAELIENS AU LIBAN

 

UNION JUIVE FRANCAISE POUR LA PAIX

ALTERNATIVE INFORMATION CENTER

Madame Mireille Fanon-Mendès France,

Docteur Hugo Ruiz Diaz Balbuena,

Maître Lea Tsemel

58 rue Daguerre, 75014, Paris

Tél /fax: 00331 43 20 83 03; [email protected], [email protected]

                                                                                                                        Paris, le 9 mai 2007

                                                                                                                                    à  Monsieur Luis Ocampo

                                                           Procureur à la Cour pénale internationale

 

 

 

Monsieur le Procureur, 

 

Vous voudrez bien trouver, ci-annexé, le texte du dossier concernant les crimes de guerre et contre l'humanité commis sur le territoire libanais durant le conflit armé de juillet 2006.

 

Nous sommes à votre entière disposition pour tout entretien à votre convenance;  ce dernier pouvant se dérouler soit en espagnol,  en français soit en anglais. 

 

Veuillez agréer, Monsieur le Procureur, l'assurance de notre respectueuse considération. 

 

 

Madame Mireille Fanon-Mendès France,                             Docteur Hugo Ruiz Diaz Balbuena

 

 

Maître Lea Tsemel

 


 

UNION JUIVE FRANCAISE POUR LA PAIX

Association dont le siège est situé : 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, France ; agissant poursuites et diligences de son Président, Monsieur Pierre STAMBUL,

ALTERNATIVE INFORMATION CENTER

Association dont le siège est situé: 4 rue Shlomzion, Jerusalem, Israël ; agissant poursuites et diligences de son Président, Monsieur Michel Warschawski

Introduites par:

Madame Mireille Fanon-Mendès France, membre de l'Association internationale des juristes démocrates et membre du Bureau national de l’UJFP

Représentée aux présentes par :

Dr Hugo RUIZ DIAZ BALBUENA, avocat et représentant de l’Association américaine des juristes auprès du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies

Maître Lea TSEMEL, avocate, carte professionnelle : 6088, Obeida street,2; Jerusalem, Israël

 

FAISANT POUR LA PRESENTE ET SES SUITES ELECTION DE DOMICILE AU 58,  RUE Daguerre, 75014 PARIS

TEL : 331 43 20 83 03,   FAX : 33 1 43 20 83 03,  E-mail : [email protected];  [email protected] 

 

……………………………………………………….

 

PRESENTATION AU PROCUREUR DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE

 

Mr Luis Moreno Ocampo,

 

CONCERNANT DES VIOLATIONS ET DES CRIMES COMMIS PAR LES RESPONSABLES ISRAELIENS AU LIBAN

 

L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center défèrent au Procureur et portent à sa connaissance, les crimes commis par les responsables israéliens durant la guerre déclenchée contre le Liban,

Afin que le Procureur enquête sur les crimes relevant de la compétence de la Cour, à savoir  les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.

 

 

1.       La présentation faite par l'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center porte sur des actes commis par les responsables israéliens

 

en violation de l’obligation de protéger les populations civiles et les biens de caractère civil en temps de guerre ainsi que les lois de la guerre,

 

en violation de l’obligation de ne pas attaquer la population civile,

 

en violation de l’obligation  de ne pas cibler l’infrastructure civile –maisons, habitations, entreprises, bâtiments…-

 

en violation de l’obligation de ne pas attaquer les lieux de culte et les sites culturels ou le patrimoine historique,

 

en violation de l’obligation de protéger l’environnement, 

 

en violation de l’obligation de ne pas utiliser des armes prohibées et de l’interdiction de soumettre intentionnellement un groupe national à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique.

 

 

       2. L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center déclarent fonder les demandes présentées au Procureur de la Cour Pénale Internationale sur les faits suivants :

 

«les responsables ont recouru à l’emploi de la force contre le Liban en ordonnant le bombardement de cibles non militaires sur le territoire de  cette République, se rendant responsables de violations des lois et des coutumes de la guerre, des dispositions des conventions de Genève et de violations des normes de protection de la personne humaine, ainsi que de violations du Statut de Rome de 1998 ».  

 

2.1 Lors des bombardements du territoire du Liban, des cibles civiles ont été attaquées. Un grand nombre de personnes ont été tuées, dont de très nombreux civils. Des immeubles d’habitation ont subi des attaques et des bombardements massifs et indiscriminés.

Les forces armées aériennes israéliennes ont mené plus de 7 000 attaques sur un territoire sans défense aérienne. Ces actions militaires ciblaient -par le biais d’attaques et de raids aériens- la population civile, la destruction de maisons, d’appartements et bâtiments civils et celle de quartiers et de villages avec la finalité de terroriser la population civile. Ces opérations militaires ont également visé la destruction de l’infrastructure en eau et en électricité. 

Les forces navales israéliennes ont procédé durant cette période à 2.500 opérations de bombardement depuis les eaux territoriales libanaises.

 

Les actions militaires menées par les forces armées israéliennes ont provoqué des destructions massives sur le territoire libanais avec plus de 1 191 personnes tuées dont des centaines d’enfants, 4 400 blessées y compris des enfants.
D’énormes dégâts ont été causés à des écoles, des hôpitaux, des stations de radiodiffusion et de télévision, des structures culturelles et sanitaires ainsi qu’à des lieux de culte. Nombre de ponts, routes ont été détruits.

 

2.2 Les attaques contre des réservoirs de pétrole et leur destruction ont eu de graves effets dommageables pour l’environnement et pour l’écosystème méditerranéen, puisque des produits extrêmement  dangereux pour l’environnement,  pour la santé de la population ainsi que pour l’économie du pays, se sont déversés dans la mer. 

 

2.3 L’emploi d’armes dites à fragmentation a eu  de lourdes conséquences pour la vie humaine spécialement pour la population civile et particulièrement pour les enfants. Les responsables israéliens ont autorisé leur utilisation, et plus encore, leur dispersion indiscriminée sur le territoire libanais.

 

3. L’armée israélienne a bombardé de manière indiscriminée les quartiers situés su sud de Beyrouth ainsi que des villages entiers se trouvant au Sud du Liban.  

 

4. Les actions militaires israéliennes se sont produites dans le contexte d’un conflit armé international régi entièrement par le droit international humanitaire.

 

5. L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center font part au Procureur de la Cour des infractions suivantes :

a. Infractions graves à la Quatrième Convention de Genève du 12 août 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre ("Conventions de Genève") en commettant des actes dirigés contre des personnes protégées aux termes des dispositions de cette Convention ;

b. Violations des lois ou coutumes de la guerre, y compris celles reconnues par l'Article 3 de la Quatrième Convention de Genève du 12 août 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre ("Convention de Genève"), disposition qui a acquis le statut de règle du droit coutumier,

en tant que crimes de guerre

et 

c. crimes contre l'humanité, commis au cours d'un conflit armé et dirigés contre une population civile, suite aux actes et opérations militaires menés dans le cadre d’un conflit armé international sur le territoire du Liban et suite aux attaques indiscriminées contre des objectifs civils ayant entraîné la mort de civils, en violation des normes et règles du droit international humanitaire.

Tous ces actes étant considérés comme constitutifs de crimes internationaux et visés par les Articles 7 et 8 du Statut de la Cour, tels qu'exposés en détail dans la synthèse des faits et le récit des violations, à savoir  des actes de violation graves du droit international, notamment le bombardement et la destruction

de villes et des villages et de la population civile

d’habitations civiles

de ponts

de réseaux de distribution et d’approvisionnement en eau, en électricité et en carburant

de réservoirs de combustibles

de routes

d’hôpitaux

de musées

d’installations de télécommunications

d’aéroports

Tous ces faits accompagnés par l’utilisation illicite contre la population civile d’armes  causant des maux superflus et frappant sans discrimination, provoquant la mort des personnes ainsi que des blessures graves et des souffrances superflues. 

 

 

I. Les faits

 

A. Les attaques indiscriminées de la population civile,  des villages et des villes au sud du Liban 

 

Attaque généralisée contre le village d’Al Duweir

 

Les forces armées israéliennes ont bombardé et détruit complètement la maison d’habitation de la famille d’Adil Akkash, située hors du village. Mr.  Mohammed Mustafa Akkash, survivant, a déclaré avoir assisté au bombardement du 14 juillet 2006. A  4 heures du matin, trois missiles ont été lancés par les forces aériennes israéliennes. 13 personnes, présentes dans la maison, ont été tuées, dont son épouse, 7 sœurs et 3 de ses enfants âgés de 6 mois à 17 ans. La maison a été totalement détruite. Les missiles ont aussi tué 13 autres personnes qui avaient trouvé refuge dans une maison mitoyenne. 

 

Occupation du village de Marwaheen, attaques contre

un convoi de civils et actes de vandalisme.

 

Les 15 et le 16 juillet 2006, les forces armées israéliennes ont attaqué  un convoi de civils en train de quitter le village. 

Les forces d’occupation israéliennes ont commis des actes de vandalisme durant l’occupation, allant jusqu’à brûler intentionnellement une maison.

 

Vers la fin du conflit armé et un peu avant le cessez le feu, les forces aériennes israéliennes ont attaqué de nouveau ce village et lancé des bombes à fragmentation dites  bombes chocolat, blessant ou tuant principalement des enfants. Elles sont appelées ainsi parce qu’elles ont la forme de jouets ou simulent un paquet de chocolat. Les enfants, attirés, les prennent ; ces paquets explosent produisant des dommages, allant jusqu’à l’invalidité à vie. La Mission Officielle de l’Union juive française pour la paix et de l'Association Américaine de Juristes  a pu recueillir à l’Hôpital du Secours populaire le témoignage d’un enfant et d’une autre personne grièvement blessés.

Il n’existe aucune justification d’ordre militaire pour ce type d’opération, qui viole les règles coutumières et conventionnelles du droit international humanitaire, car ces bombes ne visaient pas de cibles militaires mais plutôt, la population civile.

Le recours à de telles armes dans des zones où se trouve une concentration de civils viole l'interdiction des attaques sans discrimination, étant donné l'étendue importante couverte par les nombreuses bombes éparpillées et le danger qui en résulte pour tous ceux qui entrent en contact avec elles.
 

Attaque contre le village de Qana

 

Le bombardement par les forces aériennes israéliennes du village de Qana s’est produit le 30 juillet 2006. Suite à cette action militaire, 29 civils ont été tués, dont 17 enfants.

Le bombardement de Qana a reçu une réprobation générale y compris celle du Secrétaire général de l’ONU[1]et du Conseil de sécurité de l’ONU. 

Le porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Roland Huguenin, a déclaré:

 «Le fait que les victimes soient presque exclusivement des femmes et des enfants montre de manière flagrante que le bâtiment, un immeuble d'habitation dont la construction n'était pas achevée et où des civils avaient trouvé refuge, n'était pas la bonne cible. Il n'y avait pas de combattants, il n'y avait pas d'armes sur place. Il n'y avait que des femmes et des enfants »[2].


Les villageois ont pu entendre les cris et ont assisté, impuissants, à l’agonie des enfants qui se trouvaient sous les décombres.

Les forces armées israéliennes ont bombardé les routes environnantes empêchant l’arrivée des secours.

 

Attaques contre le village de Yatar

 

Dans ce village, les forces armées israéliennes ont mené des attaques et des bombardements intensifs en détruisant 230 maisons et en en endommageant 850. Le 12 juillet 2006, ce village a encore subi une attaque massive.

Le 13 août, les forces aériennes israéliennes ont attaqué une ambulance de la Croix Rouge libanaise et trois jours avant le cessez le feu, ces mêmes forces ont lancé des bombes à fragmentation sur le village. Ces actes constituent des violations flagrantes des conventions de Genève et du droit international coutumier. Les lancements de bombes à fragmentation sont assimilables à une punition collective, formellement interdite par la Convention de Genève.

 

Les attaques à Baflay, Dweir et Srifa
 

Le 13 juillet, les forces armées israéliennes ont attaqué la nuit les villages de Baflay, Dweir -situé à une quinzaine de kilomètres au nord de Tyr,  12 civils d'une même famille dans leur maison ont été tués- et Srifa. A Baflay, l’aviation militaire israélienne a tué 25 civils. Srifa est un village situé à près de trente kilomètres de la ville de Tyr et à vingt de la frontière israélienne. A la suite des attaques des 13 et 19 juillet (cette dernière étant la plus violente et la plus meurtrière), 67 civils ont trouvé la mort, dont 26 le 19 juillet ; 220 maisons ont été détruites et près de 300 gravement endommagées par les bombardements de l’aviation israélienne. Cette dernière a bombardé, de façon systématique, les convois de civils cherchant refuge dans des villages avoisinants. Le 13 juillet, 4 membres d'une même famille ont été tués sur la route.

Le même jour, l’aviation israélienne a lancé une attaque vers  4 heures du matin  tuant Aqil Meri, sa femme Ahlam, leur fils Hedi (9 ans), et leur fille Fatima (6 ans). On a entendu les pleurs de Fatima et Hedi jusqu'à 8 heures du matin.   

 

Les attaques contre le village de Gandourié

 

Le 14 juillet, l’aviation israélienne a lancé une attaque contre le village de Gandourié; d’autres ont suivi entre le 20 et le 21 juillet. Toute l’infrastructure de distribution -électricité et eau- a été détruite, des maisons endommagées et détruites. Les forces aériennes israéliennes sont allées jusqu’à bombarder le cimetière du village.

Egalement, la mosquée Husseinia de Gandourié, dans laquelle des civils ont cherché à se réfugier, a été l’objet d’une attaque. Le lieu de culte a été sérieusement endommagé.

Dans ce même village, les forces armées israéliennes ont utilisé certains lieux de culte comme base militaire.

 

La destruction du Musée de la Mémoire à Khiam

 

Les forces armées israéliennes ont mené des attaques dans le village de Khiam, situé au Liban, près de la frontière avec l’Etat d’Israël. L’attaque a été lancée contre l’ancienne forteresse de Khiam, qui, durant l’occupation israélienne, avait été transformée en centre de tortures. Après le retrait des troupes israéliennes du Liban sud en 2 000, elle a été transformée en Musée de la mémoire.

Ce musée montrait les conditions de vie des détenus et des prisonniers libanais sous le régime israélien.

Le site a été bombardé et entièrement détruit; il n’en reste qu’un tas de gravats et de décombres. 

Les forces armées israéliennes ne pouvaient pas ignorer que le site avait été transformé en Musée. Cette attaque s’apparente plus à un acte de vengeance qu’à une attaque justifiée par nécessité militaire.  

 

B. Les attaques indiscriminées des quartiers de Beyrouth Sud

 

Les quartiers situés au sud de Beyrouth ont subi des bombardements intensifs et répétés jusqu’aux derniers jours du conflit armé déclenché par l'Etat d'Israël. Les attaques indiscriminées et répétées ont provoqué le déplacement de  220,000 habitants de ces quartiers depuis le début des actions militaires israéliennes.

 

Attaque du quartier de Haret Hreik

 

Le14 juillet,  l'aviation israélienne a de nouveau bombardé le quartier de Haret Hreik, à 3 kilomètres à peine du centre de Beyrouth, lors de 3 raids aériens successifs.  Ce quartier a été considéré par les autorités israéliennes comme l’un des bastions du Hezbollah.

50 immeubles ont été détruits entraînant le déplacement de la majorité des habitants.   Pendant la première vague d’attaque, les forces armées israéliennes ont  lancé des bombes à oxygène soufflant la structure intérieure des immeubles. 5 000 autres habitations ont été endommagées dans ce quartier.


Suivant l'article 33 de la Quatrième Convention de Genève: «Aucune personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu'elle n'a pas commise personnellement. Les peines collectives, de même que toute mesure d'intimidation ou de terrorisme, sont interdites».

La politique israélienne a consisté à assimiler chaque habitant de ce quartier à un ennemi, ce qui expliquerait que les responsables militaires et politiques israéliens ont appliqué une politique systématique de punition collective.

 

  1. Le bombardement et la destruction délibérée de biens de nature industrielle et/ou commerciale


« Liban Lait », à Baalbek, est l'entreprise laitière –et de produits dérivés- la plus importante du pays. Le 17 juillet vers 3 heures du matin, cette usine a été l’objet d’une attaque aérienne. Elle a été totalement détruite : salle des commandes, atelier de traitement du lait,  conserverie et fromagerie. Cette usine produisait plus de 90% de la production libanaise de lait pasteurisé, de lait frais, de yaourt, de fromage et de lebneh. Lors du conflit, au moins 29 autres usines ont été entièrement ou partiellement détruites par des attaques israéliennes. Environ 5% du secteur industriel libanais a été anéanti. Plus de 700 entreprises industrielles auraient subi d'importants dommages.

Parmi les usines bombardées et détruites, totalement ou partiellement, figurent la verrerie Maliban à Taanayel, dans la Békaa ; l'usine de matériel médical Safieddin à Bazouriye, dans le sud du Liban ; la fabrique de mouchoirs en papier Fine à Kafr Jara, près de Saïda ; l'entreprise de matériel de construction Moussaoui, à proximité de Baalbek ; l'usine Dalal de Taanayel, dans la Békaa, qui produisait notamment des maisons préfabriquées. 

 

  1. La destruction de l’environnement


Bombardement et destruction de la centrale électrique et  destruction de réservoirs de carburant à Jiyeh

 

Les 13 et 15 juillet, les forces israéliennes ont bombardé la centrale de Jiyyeh, située à environ 25 kilomètres au sud de Beyrouth, ainsi que ses réservoirs de carburant. A la suite de cela, un incendie s'est déclaré et a duré 3 jours recouvrant les régions avoisinantes d’une  poussière blanche de béton pulvérisé et remplissant l'air de suie noire.

L’une des conséquences les plus dramatiques de cette attaque indiscriminée a été le fait que la destruction des réservoirs de carburant a entraîné le déversement de 15 000 tonnes de fioul lourd dans la mer, provoquant une marée noire, qui a contaminé le littoral libanais sur plus de 150 kilomètres.

Cette attaque délibérée contre la centrale électrique et les réservoirs de carburant a produit des effets désastreux avec des répercussions immédiates pour la population. La destruction des réservoirs de carburant  causera des dommages durables à l’environnement et à l’économie libanaise, notamment au tourisme,  qui n’ont pas encore été évalués.

Les cuves de fioul ont libéré un nuage d'hydrocarbures polyaromatiques, de dioxine et de particules; tous ces produits sont cancérigènes et peuvent provoquer des troubles respiratoires et hormonaux.

Bombardement de la centrale électrique de Saïda

 

Le 12 août, les forces armées israéliennes ont bombardé et détruit les transformateurs électriques de Saïda. La destruction des transformateurs a libéré dans l'atmosphère des biphényles polychlorés (PCB). Selon Greenpeace, les PCB sont des produits chimiques bio accumulables et persistants, c'est-à-dire qu'ils restent dans l'organisme après avoir été inhalés pouvant provoquer un cancer.

E. Dommages causés à des sites archéologiques

 

Le bombardement, la destruction des réservoirs de carburants  à Jiyyeh et le déversement consécutif de 15 000 tonnes de fioul dans la mer a touché lourdement et endommagé le site archéologique exceptionnel de Byblos -site archéologique inscrit au Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Les blocs de pierre constituant le soubassement des 2 tours médiévales -nord et sud- à l’entrée du port ont été recouverts d’une épaisse couche d’hydrocarbure. Les vestiges de l’époque antique (phénicienne, hellénistique et romaine) situés en contrebas du tell, ont également été recouverts de la même nappe d’hydrocarbure.

 

Le bombardement d'usines de verreries, de produits alimentaires et de matières plastiques, dans le centre du Liban, a également libéré ces produits chimiques ainsi que du chlore dans l'atmosphère, ce qui est susceptible d'affecter la santé de près de deux millions de personnes.

 

F.  L’utilisation illicite d’armes contre la population civile

 

Bombes à hélium

 

Dans le village de Oulla au Sud du Liban, lors de la visite de la mission officielle d’investigation à l’une des victimes, M. Ali Ibrahim Slim –rencontré une première fois à l’hôpital universitaire Rafik Hariri où il avait été transporté après avoir été blessé dans son village le 15 juillet-, le père de la victime a montré les restes de la bombe qui a détruit entièrement leur maison de 3 étages.

 

Vers 20h30, le village a été attaqué par des hélicoptères Apache alors que sa famille -12 personnes réunies- s'apprêtait à dîner. Un hélicoptère a longuement tournoyé au-dessus de leur maison, un missile est entré par le corridor entraînant la destruction totale de la maison, provoquant la mort de sa sœur de 23 ans, de sa belle sœur de 24 ans et de son frère aîné -31 ans-.

Ali Ibrahim, 30 ans, chauffeur, célibataire, est grièvement blessé aux mains, a une fracture à la jambe, un genou fracassé, et d’importantes brûlures sur le bras et la partie supérieure du dos ainsi que sur le visage.

Son beau-frère, Brahim Slimane, 54 ans, fermier et maçon, brûlé au dos et à la jambe a perdu un œil.

Les blessés n’ont pu être secourus avant la fin de matinée du lendemain, les avions continuant à tournoyer et empêchant les secours de parvenir à cet endroit. Il a été évacué à l’hôpital de Marrayun puis à celui de Beyrouth où il est resté 28 jours après avoir subi une deuxième opération à l’oreille et à la main.

Aujourd’hui, ni l’un ni l’autre ne peuvent reprendre leur activité professionnelle. Pour Ali Slim, les médecins ont diagnostiqué un handicap de 80% à la main droite, une paralysie partielle de la main gauche, et un genou lourdement handicapé par 3 vis.

 

G. Les attaques et la destruction systématique de l’infrastructure civile

 

La dévastation du territoire libanais ainsi que l’ampleur de la destruction sur une grande échelle de l’infrastructure civile ont eu lieu durant les cinq premiers jours du conflit armé.

La destruction des ponts a débuté le 12 juillet avec des bombardements aériens et terrestres massifs. Ce jour, les forces armées israéliennes ont bombardé et détruit le pont Quasmieh, axe vital entre les villes de Tyr et Saïda.

Le 13 juillet, l’aviation israélienne a bombardé l’aéroport international de Beyrouth provoquant des dommages aux pistes et aux réservoirs de fuel. Le Port de Beyrouth a été l’objet de bombardements détruisant le radar qui servait uniquement à la navigation civile.

En tout, les forces armées israéliennes ont détruit 109 ponts et 137 routes. La destruction des routes a empêché, dans de nombreux endroits, l’accès aux civils,  tout comme elle a empêché le départ de nombreux civils. A Qana, par exemple, l’aviation israélienne a bombardé, avec 3 missiles, un petit pont. Ce pont ne servait qu'au passage des éleveurs de moutons.

 

A Kaunine, les forces armées israéliennes ont détruit tout le système électrique et d’eau du village ainsi que l’école et ont provoqué la destruction des habitations civiles ; dans le village de Ainata, la destruction de l’école et de l'ensemble du système électrique ; à Bint Jabeil, les rues ont été détruites ou gravement endommagées.

 

H. Les attaques et la destruction de moyens de communication civile

 

Les forces armées israéliennes ont attaqué et entièrement détruit la station de télévision Al-Manar TV, sous prétexte qu’elle servait de moyen de propagande au Hezbollah et  au recrutement de militants.

Le fait que cette station de télévision soit un appui de communication pour le Hezbollah ne justifie en rien sa destruction et Al-Manar ne peut être considérée comme une cible militaire.

A ce propos, le Conseil de sécurité a rappelé que « …. le matériel et les installations des médias sont des biens de caractère civil et, en tant que tels, ne doivent pas  être l’objet ni d’attaque ni de représailles, tant qu’ils ne constituent pas des objectifs militaires;… »[3]

 

I. Attaques de convois civils

 

Les attaques de convois civils ont été l’une des particularités des actions militaires de la part des forces armées israéliennes. Le 15 juillet 2006, un convoi de 3 véhicules civils, fuyant la ville de Marwaheen, se dirigeait vers la ville de Tyr. Il a été attaqué entre  Chamaa et Bayadda, alors que l’armée israélienne avait annoncé qu’elle laissait 2 heures aux civils pour évacuer. Cette attaque a provoqué la mort de 16 civils ainsi que celle de plusieurs blessés.

Le 16 juillet, autorisation a été donnée à un convoi de la FINUL- composé de 4 bus, 7 camions, dont 2 blindés et 2 véhicules militaires de Police- de quitter Naqoura à 7h15, atteignant Marwaheen à 9h. A 11 heures, la population locale, qui voulait partir, était prête et la FINUL de Naqoura avait approuvé l'évacuation supplémentaire des habitants du village d'Um al Tut, près de Marwaheen. Vers 11h15,  une fois atteint le Poste d’observation militaire de la FINUL, le convoi a été informé que l’autorisation d’évacuer les civils était annulée. Il lui a été suggéré de retourner à Marwaheen. Vers  14 heures, la FINUL a obtenu une nouvelle autorisation des responsables militaires israéliens. Le premier véhicule ayant atteint une maison située dans la rue menant à la mosquée, une roquette à écran de fumée est tombée sur le toit de cette maison, ricochant et tombant juste devant le véhicule. Les civils ont quitté les véhicules et se sont regroupés sur la place centrale du village. Un émissaire a été envoyé pour demander l'arrêt immédiat de l’attaque. Mais une deuxième attaque a eu lieu, 6 autres roquettes à écran de fumée ont touché la même maison. Vers  17h30, le convoi  a enfin pu repartir vers Tyr. L’attaque était destinée à semer la panique et la terreur parmi la population civile.

Le 11 août 2006, environ 600 véhicules quittaient le village de Marjayoun - occupé depuis le 10 août 2006- en direction de la vallée de Beka. Vers 15h30, le convoi -comprenant des patients et le personnel médical de l’hôpital- avait quitté le village pour atteindre la partie orientale de la Vallée de Beka vers  21h30. Jusqu'à Hasbaya, le convoi a été escorté et entouré par 2 véhicules blindés de la FINUL. Vers 22h, quinze véhicules ont été touchés par les bombardements de l’armée israélienne, provoquant la mort de huit personnes, parmi  lesquelles un ingénieur de l’hôpital et un volontaire de la Croix Rouge du Liban qui tentaient de porter secours  à une des  personnes blessées. Pendant ce temps, une autre attaque a eu lieu sur Marwaheen. Pourtant, dès le 15 juillet, la FINUL avait obtenu l’autorisation des responsables militaires israéliens de procéder à  l’évacuation de la population civile.

Les forces armées israéliennes ont attaqué intentionnellement ce convoi en sachant que celui-ci n’était pas une cible militaire. Il s’agit d’une attaque qui a ignoré le principe de distinction entre cibles militaires et cibles civiles. 

 

J. La destruction d’écoles

Les forces armées israéliennes, durant les opérations militaires menées sur le territoire libanais, ont causé la destruction d'écoles et en ont endommagé de nombreuses.

Suivant le rapport de la Commission d’enquête au Liban mise en place par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, les attaques israéliennes ont provoqué la destruction totale et directe de 16 écoles et en ont gravement endommagé  157 autres.

 Dans la localité de Khiam, 2 écoles publiques, ainsi que 2 autres privées, ont été totalement détruites. L’école d’agriculture, quant à elle, a subi de graves endommagements.

A Bent J’beil, 6 écoles ont été entièrement détruites, une autre endommagée et partiellement détruite.


II.  LE DROIT

 

A. Les violations du Droit international Humanitaire

 

1.  Nature juridique des normes violées.

 

La Cour internationale de Justice, dans son avis consultatif sur la Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires, a déclaré que "parce qu'un grand nombre de règles du droit international humanitaire applicables dans les conflits armés sont si fondamentales pour le respect de la personne humaine et pour des 'considérations élémentaires d'humanité' ... elles constituent des principes intransgressibles du droit international coutumier"[4].

 

La Commission de droit international de l’ONU a, pour sa part, donné quelques exemples parmi lesquels les principes et les règles du droit humanitaire.

Les normes de jus cogens, ou impératives, se présentent comme des normes prohibitives. Elles interdisent certains comportements en toutes circonstances, y compris lors d'un conflit armé, indépendamment du fait que l’Etat ait signé et ratifié ou non des accords internationaux concernant la conduite dans les conflits armés.

Le droit conventionnel et coutumier du droit international humanitaire en fait forcément partie.

 

Les responsables politiques et militaires israéliens agissant en tant qu’organes de l’Etat sont tenus de respecter et de faire respecter par leurs forces armées ces normes impératives recueillies dans les instruments internationaux concernant les conflits armés,  notamment, les principes et les règles  du droit international humanitaire. 

 

2. La limitation des choix de moyen de combat

 

Il est clairement établi par le droit international humanitaire que le droit des parties à un conflit armé de choisir les méthodes et moyens de combat n’est pas illimité. Ce principe se trouve déjà énoncé dans la Déclaration de Saint Petersbourg de 1868 et réaffirmé  par l’article 35-1 du Protocole additionnel I de 1977. Cette disposition est entièrement applicable à la protection de l’environnement dans un conflit armé.

 

Quant à la IVème Convention de La Haye du 18 octobre 1907, dans son article 22, elle stipule que les  « belligérants n'ont pas un droit illimité quant au choix des moyens de nuire à l'ennemi ».

La Cour Internationale de Justice a eu l’occasion de se pencher  sur les règles coutumières qui régissent la conduite des belligérants au cours d’un conflit armé. Dans son interprétation, la CIJ a réaffirmé que:

« Les principes cardinaux contenus dans les textes formant le tissu du droit humanitaire sont les suivants. Le premier principe est destiné à protéger la population civile et les biens à caractère civil, et établit la distinction entre combattants et non-combattants; les Etats ne doivent jamais prendre pour cible des civils, ni en conséquence utiliser des armes qui sont dans l'incapacité de distinguer entre cibles civiles et cibles militaires. Selon le second principe, il ne faut pas causer de maux superflus aux combattants : il est donc interdit d'utiliser des armes leur causant de tels maux ou aggravant inutilement leurs souffrances; en application de ce second principe, les Etats n'ont pas un choix illimité quant aux armes qu'ils emploient .. »[5].

 

Il s’en dégage que la conduite d'opérations militaires est soumise à un ensemble de prescriptions juridiques. Par l’utilisation indiscriminée d’armes, de bombes à fragmentation ainsi que par des attaques contre la population civile, les responsables israéliens ont violé les articles 35.1 du protocole I et l’article 22 de la IV Convention de La Haye du 18 octobre 1907, concernant les méthodes et les moyens de guerre.

 

3. La violation des dispositions de la IVème  Convention

 

Les responsables politiques et militaires israéliens, agissant en tant qu’organes de l’Etat, ont violé la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre (article 16  - portant sur la protection générale-; 17 - sur l'évacuation-; 21 - à propos des transports terrestres et maritimes des blessés), ce qui constitue des infractions graves -article 147- dont les responsables doivent répondre devant les tribunaux compétents[6].

 

L’article 16 énonce que  les blessés et les malades, ainsi que les infirmes et les femmes enceintes seront l'objet d'une protection et d'un respect particuliers.

L’article 18 dispose qu’en aucun cas, les hôpitaux civils servant à secourir les blessés, les malades, les invalides, les femmes enceintes ne pourront être attaqués. En tout temps et en toutes circonstances, ces lieux devront être non seulement respectés, mais aussi protégés.

 

L’article 21 établit que les transports de blessés et de malades civils, d'infirmes et de femmes en couches effectués sur terre, par convois de véhicules, par train-hôpital, ou sur mer, par navires affectés à ces transports, seront respectés et protégés au même titre que les hôpitaux.

 

Pour sa part, l’article 23 établit l’obligation de ne pas prendre de mesures ou d’éviter toute action, militaire ou non, visant à empêcher l’envoi de médicaments et de matériel sanitaire ainsi que celui des objets de culte, des aliments, des vêtements destinés aux enfants de moins de quinze ans et aux femmes enceintes ou ayant accouché.

 

4. Violation de l’interdiction de destruction

 

Selon l’article 53 de la IVème  Convention de Genève, « …Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires ».

 

L’expression «opération militaire» désigne, selon le commentaire officiel du Comité international de la Croix-Rouge, «…les mouvements, les manoeuvres et les actes de toutes sortes effectués par les forces armées à des fins de combat»[7].

 

La destruction généralisée de biens civils au cours d'opérations militaires - sous les ordres du chef d’Etat major et du ministre de la Défense ainsi que sous la responsabilité du Premier Ministre- ne peut être considérée comme faisant partie d’une «opération militaire» « à des fins de combats ». D’ailleurs, on ne peut, en aucun cas, soutenir que les bombardements et la destruction des biens civils mobiliers ou immobiliers, ceux, indiscriminés, des villages, des villes et des quartiers civils, soient «absolument nécessaires». Ils ne font pas partie d’une «opération militaire licite » couverte par la disposition de l’article 53.

 

Quand il s’agit de biens protégés par la Convention, au sens de l’article147, la violation de l’article 53 -sciemment et sans aucune justification militaire, exécutée à grande échelle- constitue une «infraction grave».

 

5. Violation de l’interdiction de punitions collectives

 

L’article 33 de la IV Convention de Genève dispose qu’:

«Aucune personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu’elle n’a pas commise personnellement. Les peines collectives, de même que toute mesure d’intimidation ou de terrorisme, sont interdites…

Les mesures de représailles à l’égard des personnes protégées et leurs biens sont interdites »[8].

Le commentaire de la IV Convention de Genève interprète l’interdiction de l’intimidation ou du terrorisme comme étant « …en opposition avec tous les principes fondés sur des considérations d’humanité et de justice, c’est pourquoi l’interdiction des peines collectives est formellement complétée par l’interdiction de toute mesure d’intimidation et de terrorisme à l’égard des personnes protégées, quel que soit le lieu où elles se trouvent »[9].

Les opérations militaires menées en territoire libanais par les forces armées israéliennes suggèrent qu’elles l’ont été, non «à des fins de combat», mais en guise de punition collective et destinées soit à intimider la population civile, soit à répandre la terreur parmi celle-ci par le biais des  bombardements et de la destruction des biens mobiliers et immobiliers et d’autres biens protégés par la Convention. 

 

Quand il s’agit de biens protégés par la Convention, au sens de l’article147, la violation de l’article 53, sciemment et sans aucune justification militaire, exécutée à grande échelle, constitue une «infraction grave».

 

6.  Les violations du Protocole Additionnel I de 1977

 

L’interdiction d’attaquer la population civile

 

Les responsables politiques et militaires israéliens, agissant en tant qu’organes de l’Etat, ont violé le premier protocole additionnel -1977- à la Convention de Genève relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, et plus spécialement les articles 35 -concernant les méthodes et les moyens de guerre; 48 - à propos de l'obligation faite aux parties en conflit de faire la distinction entre personnes civiles et combattants-; 51 - sur la protection des personnes civiles-; 54 -à propos de la protection des biens indispensables à la survie de la population civile-; 56- concernant la protection des ouvrages et installation contenant des forces dangereuses. 

L’article  85 dudit Protocole décrit certaines infractions graves,

 

« Outre les infractions graves définies à l'article 11, les actes suivants, lorsqu'ils sont commis intentionnellement, en violation des dispositions pertinentes du présent Protocole, et qu'ils entraînent la mort ou causent des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé, sont considérés comme des infractions graves au présent Protocole :

·         soumettre la population civile ou des personnes civiles à une attaque;

·         lancer une attaque sans discrimination atteignant la population civile ou des biens de caractère civil, en sachant que cette attaque causera des pertes en vies humaines, des blessures aux personnes civiles ou des dommages aux biens de caractère civil, qui sont excessifs au sens de l'article 57, paragraphe 2 a iii;

·         lancer une attaque contre des ouvrages ou installations contenant des forces dangereuses, en sachant que cette attaque causera des pertes en vies humaines, des blessures aux personnes civiles ou des dommages aux biens de caractère civil, qui sont excessifs au sens de l'article 57, paragraphe 2 a iii;

·         soumettre à une attaque des localités non défendues et des zones démilitarisées … ».

 

L’interdiction d’attaquer la population civile fait partie du droit international coutumier et, comme telle, a le statut de norme impérative de droit international. Cette interdiction et l’obligation qui s’en dégagent, sont applicables aux autorités israéliennes, aux responsables militaires et aux forces armées en général[10].

Suivant son caractère de norme impérative du droit international, le fait que l’Etat soit tiers ne peut être interprété comme une autorisation -même implicite- de violer les dispositions du Protocole ou comme autorisant la perpétration de crimes de guerre ou d’autres actes illicites. D’ailleurs, les autorités israéliennes ont prétendu ne pas violer les lois et coutumes de la guerre ou les Conventions de Genève, ce qui renforce notre affirmation.

Comme dans d’autres cas, il s’agit de normes impératives qui ont directement trait à la protection des droits humains et à l’obligation du respect dû à la population civile dans son ensemble. Les autorités israéliennes, ayant planifié et ordonné l’exécution de tels actes, ont violé délibérément et gravement  le Protocole I.  

 

Cela vaut également pour le Hezbollah qui, en ciblant la population civile israélienne du nord de l'Etat d'Israël, a commis des violations du droit international humanitaire[11].

 

7. Les violations des Conventions de La Haye et d’autres instruments internationaux

 

 

Il s’agit des Conventions de La Haye -1907- à propos du droit et des coutumes en temps de guerre sur la protection des personnes civiles et celle de 1954 sur la protection des biens culturels lors de conflits armés, ainsi que de la Convention sur la prévention et la punition du crime de Génocide -1948- interdisant toute attaque contre des civils.

L’article 22 de la Convention (IV) concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et son Annexe: Règlement concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre[12], énonce clairement que les belligérants n'ont pas un droit illimité quant au choix des moyens de nuire à l'ennemi.


L’article 25 renforce cette disposition en affirmant qu’il est « ….interdit d'attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus »
[13].

 

Concernant les Conventions de La Haye de1907, la Cour Internationale de Justice a estimé dans l’affaire sur les armes nucléaires -de même que tous les participants à la procédure devant la Cour- que les dispositions du Règlement  de 1907 ont acquis un caractère coutumier[14]. Du fait de cette reconnaissance[15], les dispositions de la Convention de 1907, lient également les Etats qui n'en sont pas formellement Parties.

 

Les attaques systématiques et indiscriminées menées par les forces armées israéliennes sur territoire libanais constituent des actes de violations graves à ces dispositions. 

 

8. La violation de l’obligation de protéger et de ne pas détruire les biens culturels

 

L’Etat d’Israël est Partie à la Convention de la Haye pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, avec règlement d'exécution par dépôt de l’instrument de ratification fait le 3 octobre 1957.

Suivant les termes de l’article premier, il a donc obligation de protéger les biens culturels tels que


 « …
Les biens, meubles ou immeubles, qui présentent une grande importance pour le patrimoine culturel des peuples, tels que les monuments d'architecture, d'art ou d'histoire, religieux ou laïques, les sites archéologiques, les ensembles de constructions qui, en tant que tels, présentent un intérêt historique ou artistique, les oeuvres d'art, les manuscrits, livres et autres objets d'intérêt artistique, historique ou archéologique, ainsi que les collections scientifiques et les collections importantes de livres, d'archives ou de reproductions des biens définis ci-dessus;
b. Les édifices dont la destination principale et effective est de conserver ou d'exposer les biens culturels meubles définis à l'alinéa a, tels que les musées, les grandes bibliothèques, les dépôts d'archives, ainsi que les refuges destinés à abriter, en cas de conflit armé, les biens culturels meubles définis à l'alinéa a;
c. Les centres comprenant un nombre -considérable de biens culturels qui sont définis aux alinéas a et b, dits « centres monumentaux…
 »[16].


Suivant la disposition de l’article 4 de la Convention de La Haye de 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, les Etats sont tenus de « … respecter les biens culturels situés tant sur leur propre territoire que sur celui des autres Hautes Parties contractantes en s'interdisant l'utilisation de ces biens, celle de leurs dispositifs de protection et celle de leurs abords immédiats à des fins qui pourraient exposer ces biens à une destruction ou à une détérioration en cas de conflit armé, et en s'abstenant de tout acte d'hostilité à leur égard.” [17].

Le même instrument interdit formellement -article 4.4- « ….toute mesure de représailles à l'encontre des biens culturels ».


Pour sa part, l’article 27 de la  Convention de la Haye du
18 octobre 1907 stipule, de manière claire, que  pendant les sièges et bombardements, « ….toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour épargner, autant que possible, les édifices consacrés aux cultes, aux arts, aux sciences et à la bienfaisance, les monuments historiques, les hôpitaux et les lieux de rassemblement de malades et de blessés, à condition qu'ils ne soient pas employés en même temps à un but militaire… »[18].

 

L'armée de l'Etat d'Israël en bombardant massivement, entre autres les villages ou les villes de Marwahine, de Blida, de Qana, d' Aitaroun, de Tyr, de Nabi Chit et de Baalbek a commis de graves violations. Le bombardement et la destruction totale du Centre de la Mémoire Historique de Khiam ainsi que le bombardement, l’endommagement et/ou la destruction des lieux de cultes comme celui de Gandourié, constituent autant d’actes de violations graves du Droit international humanitaire.

 

9.  Les violations de l’obligation internationale de protéger l’environnement

 

Toute destruction de l’environnement, ayant un caractère gratuit et non justifié par les nécessités militaires, est manifestement contraire au droit international en vigueur. 

 

Pour la Cour Internationale de Justice, cette résolution « ….consacre l'opinion générale selon laquelle les considérations écologiques constituent l'un des éléments à prendre en compte dans la mise en oeuvre des principes du droit applicable dans les conflits armés. Elle précise, en effet, que «la destruction de l'environnement non justifiée par des nécessités militaires et ayant un caractère gratuit est manifestement contraire au droit international en vigueur…. »[19]

 

L’Institut de droit international rappelle que le concept d’environnement englobe notamment les ressources naturelles abiotiques et biotiques, notamment l'air, l'eau, le sol, la faune et la flore ainsi que l'interaction entre tous ces facteurs. Il comprend aussi les aspects caractéristiques du paysage[20].

Lorsque des opérations militaires se déroulent pendant un conflit armé, le même Institut rappelle que  « l'obligation de respecter la distinction entre objectifs militaires et objets non militaires, ainsi que celle entre les personnes qui prennent part aux hostilités et les membres de la population civile, demeure un principe fondamental du droit international en vigueur… ».  (Session d'Edimbourg – 1969).

 

Le droit international humanitaire interdit, en principe, la destruction des biens à caractère civil. Cette restriction entraîne la protection générale de l'environnement naturel, qui n'est pas a priori un objectif militaire, car il s’agit d’une obligation de protection de la population civile, donc de son environnement (y compris l'ensemble des moyens de survie …).

 

10. Violation de l’interdiction de ne pas causer de maux superflus

 

L’article 23  interdit « d'employer des armes, des projectiles ou des matières propres à causer des maux superflus;…de détruire ou de saisir des propriétés ennemies, sauf les cas où ces destructions ou ces saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre ».

La Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques, pouvant produire des effets traumatiques excessifs ou frapper sans discrimination[21], rappelle l’interdiction d’utiliser des méthodes ou moyens de guerre conçus pour causer, ou dont on peut s’attendre qu’ils causeront, des dommages étendus, durables et graves à l’environnement naturel.

Ces dispositions sont d’une actualité et d’une pertinence particulière quant à la protection de l’environnement en période de conflits armés.

L’article  35. 3 du Protocole I de 1977 comporte la même interdiction.

 

L’article 55. 1et 2 du Protocole fait explicitement référence à l’obligation de protection de l’environnement en relation directe avec celle de la population civile.

« La guerre sera conduite en veillant à protéger l'environnement naturel contre des dommages étendus, durables et graves. Cette protection inclut l'interdiction d'utiliser des méthodes ou moyens de guerre conçus pour causer ou dont on peut attendre qu'ils causent de tels dommages à l'environnement naturel, compromettant, de ce fait, la santé ou la survie de la population».


11. Les attaques contre l'environnement naturel à titre de représailles sont interdites.


L'article 35 énonce la règle générale applicable à tous les actes de guerre, tandis que l'Article 55 a pour but de protéger la population civile des effets de la guerre sur l'environnement.


Quoi qu’il en soit, les deux articles interdisent :

 

a) d’attaquer l’environnement (c’est-à-dire, d’entreprendre des actions militaires de guerre pouvant nuire ou produire des effets dommageables, dégrader ou détruire l’environnement dans lequel vivent des populations civiles…)


b) d’utiliser l’environnement comme tel en tant qu’instruments de guerre.

 

De plus, l'Article 54 prévoit explicitement l'interdiction de détruire, entre autres, des zones agricoles et des ouvrages d'irrigation.


Enfin, l'Article 36 oblige les Parties contractantes au Protocole I à déterminer si, l'emploi, la mise au point ou l'acquisition d'une nouvelle arme est compatible avec le droit international. A l’évidence, dès le moment où le choix des moyens et des méthodes de guerre n’est pas illimité, les règles sur la protection de l'environnement doivent également être prises en considération. Et, sans aucun doute, l’obligation de protection de la population civile englobe également celle de l’environnement.

 

Comme la Cour Internationale de Justice  l’a pertinemment souligné, « …considérées ensemble, ces dispositions consacrent une obligation générale de protéger l'environnement naturel contre des dommages étendus, durables et graves; une interdiction d'utiliser des méthodes et moyens de guerre conçus pour causer, ou dont on peut attendre qu'ils causeront, de tels dommages; et une interdiction de mener des attaques contre l'environnement naturel à titre de représailles… »[22].

 

La CIJ va encore plus loin,  affirmant que « ….les Etats doivent aujourd'hui tenir compte des considérations écologiques lorsqu'ils décident de ce qui est nécessaire et proportionné dans la poursuite d'objectifs militaires légitimes. Le respect de l'environnement est l'un des éléments qui permet de juger si une action est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité…. »[23].

 

En prenant part aux bombardements des réservoirs contenant des produits pétroliers à Jihyé, l’Etat israélien a agi en violation de son obligation de ne pas causer de dommages substantiels et/ou irréversibles ou graves à l’environnement.

 

B. Les crimes internationaux définis dans le Statut de la Cour

1. Crimes de guerre

Aux fins du Statut, on entend par « crimes de guerre » :

 a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'ils visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève :

iv) La destruction et l'appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ;

v) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les forces d'une puissance ennemie ;

vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre personne protégée de son droit d'être jugé régulièrement et impartialement ;

vii) La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale ;

viii) La prise d'otages ;

b) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir, l'un quelconque des actes ci-après :

i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités ;

ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil, c'est-à-dire des biens qui ne sont pas des objectifs militaires ;

iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d'une mission d'aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations Unies, pour autant qu'ils aient droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil ;

iv) Le fait de diriger intentionnellement une attaque en sachant qu'elle causera incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil ou des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu ;

v) Le fait d'attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires ;

vi) Le fait de tuer ou de blesser un combattant qui, ayant déposé les armes ou n'ayant plus de moyens de se défendre, s'est rendu à discrétion ;

vii) Le fait d'utiliser indûment le pavillon parlementaire, le drapeau ou les insignes militaires et l'uniforme de l'ennemi ou de l'Organisation des Nations Unies, ainsi que les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève, et, ce faisant, de causer la perte de vies humaines ou des blessures graves ;

viii) Le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d'une partie de sa population civile, dans le territoire qu'elle occupe, ou la déportation ou le transfert à l'intérieur ou hors du territoire occupé de la totalité ou d'une partie de la population de ce territoire ;

ix) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l'enseignement, à l'art, à la science ou à l'action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, à condition qu'ils ne soient pas des objectifs militaires ;

x) Le fait de soumettre des personnes d'une partie adverse tombées en son pouvoir à des mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques quelles qu'elles soient qui ne sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou hospitalier, ni effectuées dans l'intérêt de ces personnes, et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en danger leur santé ;

xi) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise des individus appartenant à la nation ou à l'armée ennemie ;

xii) Le fait de déclarer qu'il ne sera pas fait de quartier ;

xiii) Le fait de détruire ou de saisir les biens de l'ennemi, sauf dans les cas où ces destructions ou saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre ;

xiv) Le fait de déclarer éteints, suspendus ou non recevables en justice les droits et actions des nationaux de la partie adverse ;

xv) Le fait pour un belligérant de contraindre les nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays, même s'ils étaient au service de ce belligérant avant le commencement de la guerre ;

xvi) Le pillage d'une ville ou d'une localité, même prise d'assaut ;

xvii) Le fait d'employer du poison ou des armes empoisonnées ;

xviii) Le fait d'employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues ;

xix) Le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d'entailles ;

xx) Le fait d'employer les armes, projectiles, matières et méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent l'objet d'une interdiction générale et qu'ils soient inscrits dans une annexe au présent Statut, par voie d'amendement adopté selon les dispositions des articles 121 et 123 ;

xxi) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants ;

xxii) Le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à l'article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une infraction grave aux Conventions de Genève ;

xxiii) Le fait d'utiliser la présence d'un civil ou d'une autre personne protégée pour éviter que certains points, zones ou forces militaires ne soient la cible d'opérations militaires ;

xxiv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit international, les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève ;

xxv) Le fait d'affamer délibérément des civils comme méthode de guerre, en les privant de biens indispensables à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l'envoi des secours prévus par les Conventions de Genève ;

xxvi) Le fait de procéder à la conscription ou à l'enrôlement d'enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités ;

Les qualifications juridiques des infractions suivant le statut de Rome de 1998.

Les cas d’espèce.

Les infractions suivantes ont été relevées au cours de la guerre et de l’après-guerre au Liban.

iv) La destruction et l'appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ;

Les destructions par les attaques militaires israéliennes sur territoire libanais ont été causées par des opérations militaires menées à grande échelle.

 

Le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, a déclaré que l'attaque du 12 juillet menée par le Hezbollah constituait un «acte de guerre» et, en lançant l'opération Changement de direction, a promis au Liban une «riposte très douloureuse et de grande ampleur»[24].

 Le Chef d’Etat Major, Dan Haloutz, a publiquement déclaré qu’il voulait une guerre totale contre le Liban, le faisant ainsi revenir 20 ans en arrière[25]. Ces déclarations et prises de position publiques suggèrent une volonté explicite, de la part des autorités israéliennes, de détruire entièrement le pays par des actions militaires de grande envergure sur l'ensemble du territoire libanais.

Les attaques militaires israéliennes se placent dans le contexte d’une politique systématique et délibérée de destruction massive des biens civils ainsi que dans celui d’une politique qui a, volontairement, ignoré les obligations que lui imposent le droit international général et le droit international humanitaire. 

 

Selon les données fournies par le gouvernement libanais :

 

32 points vitaux (distribution d’eau, d’électricité, ponts et ports) ont été ciblés et bombardés

 

109 ponts

 

137 routes détruits ou endommagés par les bombardements.

 

Par exemple, à  Yatar

      230 maisons détruites

      850 maisons gravement endommagées.

 

Mais aussi dans le quartier de Haret Hreik ;

      50 immeubles détruits lors des attaques militaires israéliennes

      déplacements massifs de populations

      5000 habitations civiles gravement endommagées

 

et à Gandourié:

      destruction généralisée de toute l’infrastructure de distribution en eau et en électricité.

 

Ces destructions massives ne répondaient nullement aux exigences militaires de combat, mais plutôt à une volonté explicite de raser et de détruire le Liban. La destruction généralisée et massive des biens civils de la part de l’Etat d’Israël ne peut être considérée comme faisant partie d’une «opération militaire» « à des fins de combats » et ces actions ne sont pas couvertes par les termes de l’article 53 de la IV Convention en tant qu’opérations militaires licites.

 

i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités ;

Les attaques militaires généralisées et constantes contre la population menées par les forces armées israéliennes font partie d’une politique mise en place sciemment.

Ainsi l’attaque contre le village de Qana constitue :

Une punition collective

 

Des mesures d’intimidation pour semer la terreur parmi la population en tant qu’actes de terrorisme.

 

Le Secrétaire Général de l’ONU, dans sa Déclaration du 30 juillet 2006, a  « … condamné l’attaque israélienne de Qana… » appelant à un cessez le feu immédiat [26]. Le Conseil des droits de l’Homme, quant à lui, a fermement condamné « … le bombardement massif des populations civiles libanaises, particulièrement les massacres de Cana, Marwahine, el-Duweir, el-Bayadah, el-Qaa, Chiyah, Ghazieh et d'autres agglomérations libanaises, qui ont causé des centaines de morts et de blessés, surtout parmi les femmes et les enfants, ainsi que le déplacement de civils, qui concernerait un million de personnes selon une première évaluation, et aggrave les souffrances des Libanais… »[27].

Les attaques dirigées à grande échelle  contre la population civile à Qana, Srifa, Blida, Baflay, Dweir et Srifa et les attaques contre les quartiers sud de Beyrotuh constituent aussi:

 

Une punition collective

 

Des mesures d’intimidation

 

Des mesures destinées à semer la terreur parmi la population en tant qu’actes de terrorisme.

 

La politique israélienne a voulu assimiler chaque habitant à un ennemi combattant, appliquant une stratégie systématique de punition collective et de terrorisme.

 

La commission d’enquête sur le Liban, mise en place par le Conseil des Droits de l’Homme a souligné, à propos des attaques contre la population civile, que

« … the attacks against civilians or their property were direct and deliberate, where abductions, transfers and detentions in Israel of civilians occurred, it can be consider that there is a violation of the right to life, the right to property, the interdiction of inhuman, humiliating and degrading treatment. Moreover, these deliberate strikes against civilians amount in fact to summary and extra-judicial executions of persons (suspected or assimilated to terrorists-enemies). It not only violated the fundamental rights of these persons (right to life, right to personal security, fair trial, non- discrimination) but also constitutes a very negative State practice, extremely disturbing for contemporary legal culture ». (Report of the Commission of Inquiry on Lebanon pursuant to, Human Rights Council resolution S-2/1, 23th  november 2006, 30 (a).

Les attaques de convois de civils constituent des actes de punition collective, des représailles contre la population civile, des actes d’intimidation en vue de terroriser cette population. Ces attaques ont, de toute évidence, été disproportionnées, en violation du principe de distinction et ne peuvent être justifiées par le fait que les civils ou les véhicules, étaient des cibles militaires.

 

ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil, c'est-à-dire des biens qui ne sont pas des objectifs militaires ;

Les déclarations et prises de position publiques du premier Ministre et du Chef d’Etat major suggèrent une volonté explicite d’attaquer de manière systématique la population civile.

Les opérations militaires israéliennes, dans le contexte des déclarations des hauts responsables de l’Etat,  qui ont détruit totalement ou partiellement les écoles publiques et privées, dénotent une volonté explicite de destruction et se placent dans le contexte d'attaques généralisées et systématiques contre des biens civils.

Suite aux attaques israéliennes,

16 écoles ont été entièrement détruites

157 écoles gravement endommagées ou partiellement détruites.

Les écoles jouissent de la protection du droit international humanitaire -protection consacrée par le protocole Additionnel, articles 52 et 57-. et même en cas de doute, elles ne peuvent être prises pour cibles militaires comme le dispose le même Protocole à l’article 52. 3.

 Il est hors de doute que les écoles ne peuvent, en aucun cas, être considérées comme des objectifs militaires. Les actes israéliens ne répondent pas au critère de « nécessité militaire », car les attaques contre les écoles ne peuvent procurer aux combattants israéliens des avantages militaires. 

Outre les écoles, des usines et des entreprises l'ont aussi été (29 usines entièrement ou partiellement détruites et près de 700 autres entreprises industrielles ayant subi d'importants dommages).

 

Le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies a également condamné, sans ambiguïté, les attaques intentionnelles et généralisées contre les biens civils en affirmant qu’il « condamne également le bombardement par Israël des ouvrages de l’infrastructure civile d’importance vitale, qui a provoqué des dégâts étendus et des dommages importants à des biens publics et privés ».

 

iv ) Le fait de diriger intentionnellement une attaque en sachant qu'elle causera incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil ……ou des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu ;

Les quartiers entiers du sud de Beyrouth ont été littéralement ravagés par les bombardements israéliens ainsi du quartier Haret Hreik. Ce cas n’est qu’un parmi d'autres. Toutes ces attaques ont été ordonnées et exécutées sciemment, tout en sachant que des telles opérations militaires allaient de toute évidence, causer des dommages excessifs, la mort de civils et occasionner des blessures à une partie de la population civile.   

ou des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu ;

Les déclarations et prises de position publiques du premier Ministre et du Chef d’Etat Major, ci-dessus rappelées, suggèrent une volonté explicite d’attaquer de manière systématique la population civile  afin de causer les plus grands dommages sur le territoire libanais, allant jusqu’à provoquer des dommages graves à l’environnement par le biais d’attaques militaires indiscriminées: pollution des côtes, pollution de la mer Méditerranée, destruction des espèces marines, endommagement des sites historiques, contamination atmosphérique ainsi que des effets négatifs sur la santé de la population civile.

      Bombardement et destruction totale de réservoirs de carburant à Jiyeh

      Déversement de 15000 tonnes de fioul lourd dans la mer, provoquant une marée

      Contamination massive du littoral libanais sur plus de 150 kilomètres

      Contamination marine remontant au Nord jusqu’à 200 kilomètres ;

 

Tout cela a causé des dommages graves à l’environnement marin, aux espèces marines et au milieu marin dans son ensemble.

Libération dans l’air d’un nuage d'hydrocarbures polyaromatiques, de dioxine et de particules; tous ces produits cancérigènes peuvent provoquer des troubles respiratoires et hormonaux,

 

Bombardement et destruction de la  centrale électrique de Saïda,

 

Destruction des transformateurs libérant dans l’atmosphère des biphényles polychlorés (PCB). Selon le rapport produit par Greenpeace, les PCB sont des produits chimiques bioaccumulables et persistants, c'est-à-dire qu'ils restent dans l'organisme après avoir été inhalés et peuvent provoquer un cancer.

 

Le bombardement de réservoirs de pétrole dans un territoire sans aucune défense aérienne et la destruction de la centrale électrique, constituent des actes intentionnels, avec volonté de détruire l’environnement et de faire revenir le Liban vingt ans en arrière. Ces actions militaires ne peuvent, en aucun cas, être considérées procurer, aux forces israéliennes, des avantages militaires.

 

v) Le fait d'attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires

Les déclarations et prises de position publiques du premier Ministre et du Chef d’Etat Major ci-dessus rappelées suggèrent une volonté explicite d’attaquer de manière systématique la population civile et de causer les plus grands dommages sur le territoire libanais[28]. Ces déclarations et prises de position publiques suggèrent une volonté explicite d’attaquer des villes, des villages, des habitations ou des bâtiments ne bénéficiant d'aucune défense militaire et qui ne constituent aucunement des objectifs militaires.

Ainsi de Qana,  avec son cortège de destruction massive de maisons et d’habitations

De Srifa, avec son cortège de destruction massive de maisons et d’habitations

Et de certains quartiers sud de Beyrouth, lors d'une attaque indiscriminée

Ces trois cas sont cités en tant qu'exemples les plus frappants, mais plusieurs autres attaques et atrocités graves et intentionnelles ont été menées par les forces armées israéliennes contre d’autres villages.

ix) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments

consacrés à la religion, à l'enseignement, à l'art, à la science ou à l'action

caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, à condition qu'ils ne soient pas des objectifs militaires

Les déclarations et prises de position publiques du premier Ministre et du Chef d’Etat Major ci-dessus rappelées suggèrent une volonté explicite d’attaquer de manière systématique la population civile et de causer les plus grands dommages sur le territoire libanais[29]. Ces déclarations et prises de position publiques suggèrent une volonté explicite d’attaquer et de détruire des lieux de culte et d’autres sites de nature religieuse et des monuments historiques.

Notamment,

 

Bombardement et destruction totale du musée de la Mémoire à Khiam

 

Bombardement de la mosquée Husseinia de Gandourié

 

Destruction du centre de santé destinée à la population civile  du quartier sud de Beyrouth.

 

Ces cas d’espèce sont cités à titre illustratif, de nombreux autres cas de destruction des lieux de culte, bombardement de cimetières et attaques contre de sites culturels ont eu lieu.

2. Crimes contre l’Humanité.

L’article 7 du Statut de Rome qualifie de crimes contre l’humanité les actes suivants :

1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l'humanité l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque :

a) Meurtre ;

b) Extermination ;

c) Réduction en esclavage ;

d) Déportation ou transfert forcé de population ;

e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation

des dispositions fondamentales du droit international ;

f) Torture ;

g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou

toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence

de la Cour ;

i) Disparitions forcées de personnes ;

j) Crime d'apartheid ;

k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

2. Aux fins du paragraphe 1 :

a) Par « attaque lancée contre une population civile », on entend le comportement qui consiste en la commission multiple d'actes visés au paragraphe 1 à l'encontre d'une population civile quelconque, en application ou dans la poursuite de la politique d'un État ou d'une organisation ayant pour but une telle attaque ;

b) Par « extermination », on entend notamment le fait d'imposer intentionnellement des conditions de vie, telles que la privation d'accès à la nourriture et aux médicaments, calculées pour entraîner la destruction d'une partie de la population ;

c) Par « réduction en esclavage », on entend le fait d'exercer sur une personne l'un

quelconque ou l'ensemble des pouvoirs liés au droit de propriété, y compris dans le cadre de la traite des être humains, en particulier des femmes et des enfants ;

d) Par « déportation ou transfert forcé de population », on entend le fait de déplacer de force des personnes, en les expulsant ou par d'autres moyens coercitifs, de la région où elles se trouvent légalement, sans motifs admis en droit international ;

e) Par « torture », on entend le fait d'infliger intentionnellement une douleur ou des

souffrances aiguës, physiques ou mentales, à une personne se trouvant sous sa garde ou sous son contrôle ; l'acception de ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légales, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles ;

f) Par « grossesse forcée », on entend la détention illégale d'une femme mise enceinte de force, dans l'intention de modifier la composition ethnique d'une population ou de commettre d'autres violations graves du droit international. Cette définition ne peut en aucune manière s'interpréter comme ayant une incidence sur les lois nationales relatives à la grossesse ;

g) Par « persécution », on entend le déni intentionnel et grave de droits fondamentaux en violation du droit international, pour des motifs liés à l'identité du groupe ou de la collectivité qui en fait l'objet ;

h) Par « crime d'apartheid », on entend des actes inhumains analogues à ceux que vise le paragraphe 1, commis dans le cadre d'un régime institutionnalisé d'oppression systématique et de domination d'un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous autres groupes raciaux et dans l'intention de maintenir ce régime ;

i) Par « disparitions forcées de personnes », on entend les cas où des personnes sont arrêtées, détenues ou enlevées par un État ou une organisation politique ou avec l'autorisation, l'appui ou l'assentiment de cet État ou de cette organisation, qui refuse ensuite d'admettre que ces personnes sont privées de liberté ou de révéler le sort qui leur est réservé ou l'endroit où elles se trouvent, dans l'intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une période prolongée.

3. Aux fins du présent Statut, le terme « sexe » s'entend de l'un et l'autre sexe, masculin et féminin, suivant le contexte de la société. Il n'implique aucun autre sens.

Le cas d’espèce

h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour

Les déclarations et prises de position publiques du premier Ministre et du Chef d’Etat Major ci-dessus rappelées suggèrent une volonté explicite d’attaquer de manière systématique la population civile et de causer les plus grands dommages sur le territoire libanais[30]. Ces déclarations et prises de position publiques suggèrent une volonté explicite de persécuter une partie de la population civile libanaise au motif de son appartenance politique, culturel et religieux.

Les forces armées israéliennes ont attaqué prioritairement les villes et villages où se trouvaient des civils, qui, selon les autorités, étaient « des sympathisants du Hezbollah ».

Le crime contre l’humanité conforme à cette disposition, a été commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque.

Notamment,

      Bombardement et meurtre de civils à Qana

      Bombardements et meurtre de civils à srifa

      Bombardements et meurtre de civils à Blida

      Bombardement massif et systématique des quartiers sud de Beyrouth avec meurtre de civils

Ces cas d’espèce sont cités comme des illustrations, plusieurs autres cas de persécution de la population civile ont eu lieu sur le territoire libanais. 

Aucun motif légitime, légalement admis, n’a été invoqué pour expliquer les bombardements intensifs des derniers jours du conflit.

Il nous faut en conclure qu’il y a, réellement, eu, au Liban,  une attaque équivallant à une tentative de transfert forcé de population, dans le cadre d’une attaque généralisée contre la population civile et dès lors crime contre l’humanité.

k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

Le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, a déclaré que l'attaque du Hezbollah le 12 juillet constituait un «acte de guerre» et, en lançant l'opération Changement de direction, a promis au Liban une «riposte très douloureuse et de grande ampleur»[31].

 Le Chef d’Etat Major, Dan Haloutz, a publiquement déclaré qu’il voulait une guerre totale contre le Liban, le faisant ainsi revenir 20 ans en arrière[32]. Ces déclarations et prises de position publiques suggèrent une volonté explicite de commettre et/ou ordonner la réalisation du crime contre l’humanité par des actes inhumains afin de causer intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

Notamment,

      La dispersion sur le territoire libanais de bombes à fragmentation dans les champs et dans les villages, qui a causé des souffrances graves à la population civile ; 

      La dispersion sur le territoire libanais de bombes chocolat qui a causé des souffrances aux enfants par des blessures graves ;

      La dispersion sur le territoire libanais de bombes chocolat qui a causé la mort des civils, dont des enfants.

C. Fondements de la demande d’ouverture d’enquête et sa recevabilité

L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center fondent la demande d’ouverture d’enquête au Procureur sur l’article 15 du statut de Rome de 1998 et sur les attributions qui lui en sont conférées. Selon ledit article,

 

« 1. Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour.

2. Le Procureur vérifie le sérieux des renseignements reçus. À cette fin, il peut rechercher des renseignements supplémentaires auprès d'États, d'organes de l'Organisation des Nations Unies, d'organisations intergouvernementales et non gouvernementales, ou d'autres sources dignes de foi qu'il juge appropriées, et recueillir des dépositions écrites ou orales au siège de la Cour.

3. S'il conclut qu'il y a une base raisonnable pour ouvrir une enquête, le Procureur présente à la Chambre préliminaire une demande d'autorisation en ce sens, accompagnée de tout élément justificatif recueilli. Les victimes peuvent adresser des représentations à la Chambre préliminaire, conformément au Règlement de procédure et de preuve.

4.Si elle estime, après examen de la demande et des éléments justificatifs qui l'accompagnent, qu'il existe une base raisonnable pour ouvrir une enquête et que l'affaire semble relever de la compétence de la Cour, »… la Chambre préliminaire donne son autorisation, sans préjudice des décisions que la Cour prendra ultérieurement en matière de compétence et de recevabilité… ».

Aux termes de l’article 17 du Statut de Rome, une affaire ne sera jugée irrecevable que si :

a) L'affaire fait l'objet d'une enquête ou de poursuites de la part d'un État ayant compétence en l'espèce, à moins que cet État n'ait pas la volonté ou soit dans l'incapacité de mener véritablement à bien l'enquête ou les poursuites ;

b) L'affaire a fait l'objet d'une enquête de la part d'un État ayant compétence en l'espèce et que cet État a décidé de ne pas poursuivre la personne concernée, à moins que cette décision ne soit l'effet du manque de volonté ou de l'incapacité de l'État de mener véritablement à bien des poursuites ;

c) La personne concernée a déjà été jugée pour le comportement faisant l'objet de la plainte, et qu'elle ne peut être jugée par la Cour en vertu de l'article 20, paragraphe 3

d) L'affaire n'est pas suffisamment grave pour que la Cour y donne suite.

2. Pour déterminer s'il y a manque de volonté de l'État dans un cas d'espèce, la Cour considère l'existence, eu égard aux garanties d'un procès équitable reconnues par le droit international, de l'une ou de plusieurs des circonstances suivantes : a) La procédure a été ou est engagée ou la décision de l'État a été prise dans le dessein de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale pour les crimes relevant de la compétence de la Cour visés à l'article 5 ;

b) La procédure a subi un retard injustifié qui, dans les circonstances, est incompatible avec l'intention de traduire en justice la personne concernée ;

c) La procédure n'a pas été ou n'est pas menée de manière indépendante ou impartiale mais d'une manière qui, dans les circonstances, est incompatible avec l'intention de traduire en justice la personne concernée.

L'Union  juive française pour la paix et l'Alternative Information Center constatent que les tribunaux israéliens n’ont pas, à leur connaissance, procédé à l’ouverture d’aucune enquête concernant les crimes commis sur le territoire du Liban. Les tribunaux israéliens, à leur connaissance, n’ont entamé aucune poursuite judiciaire en vue de juger et de punir les responsables desdites violations graves du Statut de Rome et du droit international humanitaire.

Suite à l’inaction des autorités compétentes, l’Etat  d’Israël -par le biais des tribunaux internes en tant qu’organes de l’Etat- a manqué à sa responsabilité première de poursuivre et punir les personnes qui se trouvent sous sa juridiction et sous son autorité.

La présente communication est recevable. 

D. La compétence de la Cour sur les crimes commis au Liban

Compétence rationae temporis

Les  faits mentionnés dans la présente communication se sont produits après l’entrée en vigueur du Statut de Rome en date du 1er juillet 2002.

Les faits mentionnés dans la présente communication se sont produits durant le conflit armé du 12 juillet 2006 jusqu’au cessez-le – feu en août 2006. 

Compétence rationae materiae

Les faits mentionnés dans la présente communication tombent sous la compétence de la Cour  en tant que :

-  crimes de guerre

- crimes contre l’Humanité

Compétence rationae personae

L'Union  juive française pour la paix et l'Alternative Information Center considèrent que les personnes suivantes:

- Ehud OLMERT, Premier Ministre 

- Amir PERETZ, Ministre de la Défense

 - Dan HALOUTZ ,  chef d’Etat Major 

- ainsi que toute personne dont l’enquête révèlerait la culpabilité

sont certainement les responsables des crimes commis sur le territoire du Liban entre les mois de juillet et août 2006. 

L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center sont  conscients du fait que l’Etat d’Israël n’a pas ratifié le Statut de Rome. L’Etat d’Israël est tiers au Statut au sens de la Convention de Vienne sur les droits des traités du 23 mai 1969. Aux termes de l’article 2 h) « (l)’expression « Etat tiers » s’entend d’un Etat qui n’est pas partie au traité». Et, effectivement, suivant les termes de l’article 34, (u)n traité ne crée ni obligations ni droits pour un Etat tiers sans son consentement.

 

Il est vrai que la Cour Internationale de Justice s’est prononcée sur ce point. Et cela, bien qu’il s’agissait- comme elle-même l’a reconnu- d’opposer un droit fondé sur son caractère de norme erga omnes[33]. La CIJ a dit qu’elle :

 

«… ne saurait, en l'espèce, exercer la compétence qu'elle tient des déclarations faites par les Parties conformément au paragraphe 2 de l'article 36 de son Statut car, pour se prononcer sur les demandes du Portugal, elle devrait statuer à titre préalable sur la licéité du comportement de l'Indonésie en l'absence du consentement de cet Etat[34].

 

Cette affirmation- et nous le reconnaissons- est largement fondée sur la jurisprudence internationale[35]

L'Union  juive française pour la paix et l'Alternative Information Center ont néanmoins la conviction juridique que le fait d’être tiers ne peut valablement et ne doit pas juridiquement empêcher l’ouverture d’une enquête afin de déterminer la réalité des crimes commis ainsi que déterminer les responsabilités pénales individuelles, surtout quand il s’agit des crimes internationaux.

Arguments juridiques

L'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center avancent les arguments suivants dont la source se trouve dans la jurisprudence des tribunaux israéliens et dans celles des tribunaux internationaux.

1. L’absence de lien conventionnel de l’Etat d’Israël par rapport au Statut de Rome n’est pas un empêchement en droit international pour ouvrir une enquête.

La Cour suprême d'Israël dans l'affaire Eichmann avait qualifié les actes criminels perpétrés par l’accusé comme suit :

"Ces crimes constituent des actes qui nuisent aux intérêts internationaux vitaux ; ils sapent les fondations et la sécurité de la communauté internationale ; ils violent les valeurs morales universelles et les principes humanitaires qui reposent au coeur même des systèmes de droit pénal adoptés par les nations civilisées. En droit international, le principe fondamental concernant ces crimes est que leur auteur qui, ce faisant, peut être présumé parfaitement conscient du caractère odieux de son acte, doit répondre de sa conduite...Ces crimes engagent la responsabilité pénale individuelle parce qu'ils contestent les fondations de la société internationale et heurtent la conscience des nations civilisées… Ils comprennent la perpétration d'un crime international qu'il est dans l'intérêt de toutes les nations du monde de prévenir" (Israël c/ Eichmann, 36 International Law Reports 277, 291-293 (Isr. Ct 1962)). Reproduit affaire Tadic 57.

Pour l'Union juive française pour la paix et l'Alternative Information Center, il est douteux que l’argument d’absence de lien conventionnel, -c’est à- dire le fait que l’Etat d’Israël ait exercé son droit souverain de ne pas ratifier le Statut de Rome- soit un argument juridique valable et décisif dans le cas d’espèce.

Vu la gravité et l’ampleur des crimes commis par les responsables israéliens mentionnés dans la présente communication sur le territoire libanais et, tenant compte du fait qu’il s’agit de violations extrêmement graves des normes impératives de droit international, rien n’empêche valablement et juridiquement qu’une enquête soit ouverte par le Procureur.

 2. L’argument de l’absence de lien conventionnel et l’argument de la souveraineté ne sont pas recevables. L’ouverture d’une enquête est conforme à l’Etat du droit international

La souveraineté de l’Etat est un argument qui n’est pas recevable dans le cas d’espèce. Comme l’a remarqué le Tribunal Pénal international pour l’ex Yougoslavie,

"Une dernière remarque concernant cette question de…la souveraineté des Etats : les crimes qu'il est demandé au Tribunal international de juger ne sont pas des crimes d'un caractère purement interne. Ce sont réellement des crimes de caractère universel, bien reconnus en droit international comme des violations graves du droit international humanitaire et qui transcendent l'intérêt d'un seul Etat. La Chambre de première instance est d'avis que, dans les circonstances, les droits souverains des Etats ne peuvent pas et ne devraient pas l'emporter sur le droit de la communauté internationale à agir de façon appropriée dans la mesure où ces crimes touchent l'ensemble de l'humanité et suscitent l'indignation de toutes les nations. Il ne peut, par conséquent, y avoir d'objection à ce qu'un tribunal légalement constitué juge ces crimes au nom de la communauté internationale" (Décision de la Chambre de première instance, par. 42. Cité dans La Chambre d’appel, 2 octobre 1995, Le Procureur c/Dusko Tadic, Alias Dule, Arrêt relatif à l’Appel de la défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 59.

Les cas mentionnés dans la présente communication sont des crimes commis qui transcendent le Statut de Rome. De ce fait, ils fondent le droit du Procureur de procéder à l’ouverture d’une enquête. 

Si ces crimes restent impunis par le simple fait que cet Etat n’a pas ratifié le statut de Rome, alors, comme l’a bien remarqué le Tribunal pénal International pour l’ex Yougoslavie, 

« (c)e serait une parodie du droit et une trahison du besoin universel de justice si le concept de la souveraineté de l'Etat pouvait être soulevé avec succès à l'encontre des droits de l'homme ».  (La Chambre d’appel, 2 octobre 1995, Le Procureur c/Dusko Tadic, Alias Dule, Arrêt relatif à l’Appel de la défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 58).

3. Interprétation téléologique et évolutive du Statut de Rome

En créant la Cour Pénale Internationale, les Etats membres, reflétant largement l’intérêt général de l’humanité, ont mis en place un mécanisme institutionnel judiciaire et juridique dont le but déclaré est de traduire en justice les personnes responsables de violations graves du droit international humanitaire, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crime de génocide, en vue  

      De décourager la perpétration de futures violations,

      De contribuer au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales et au respect du droit et des valeurs humaines

      De garantir que les responsables de tels crimes internationaux ne jouiraient plus d’aucune impunité.

En ce sens, les Etats considèrent, dans le Préambule du Statut, que « ….les crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale…. » se montrant déterminés « …à mettre un terme à l'impunité des auteurs de ces crimes et à concourir ainsi à la prévention de nouveaux crimes… ».

Dans le Jugement Stakic, la Chambre de première instance du Tribunal International pour l’Ex Yougoslavie a pertinemment déclaré:

« dans le cadre de la lutte contre les crimes internationaux, la dissuasion constitue une tentative d’intégrer ou de réintégrer dans la société des personnes qui se croyaient hors de portée du droit international pénal. Ces personnes doivent être avisées qu’à moins de respecter les normes universelles fondamentales du droit pénal, elles s’exposent non seulement à des poursuites, mais aussi à des sanctions de la part des tribunaux internationaux ». (Le Procureur c/ Milomir Stakic,  31 juillet 2003, 902)

Si les responsables israéliens continuent à jouir de l’impunité, ce fait pourrait être interprété comme un message à d’autres responsables, non pas aux fins de  décourager la perpétration de futures violations du droit international humanitaire, mais plutôt comme incitatif à le faire, car il suffirait que les responsables soient les nationaux d’un Etat tiers pour que l’ensemble des dispositions du Statut de Rome deviennent ineffectives. 

Si ces violations graves des normes impératives de droit international et si les crimes internationaux commis par les autorités mentionnées dans la présente communication restent impunis, c’est tout le système de protection des droits humains qui sera profondément discrédité.  Si ces crimes qui ébranlent la conscience humaine et la conscience de la communauté internationale sont impunis, les victimes n’auront d’autre choix que d’assister à «une parodie du droit» et à l’impuissance structurel de la Cour Pénale Internationale.

Les arguments exposés ci-dessus justifient, à suffisance de droit, le fait de procéder à une telle enquête au-delà du fait que l’Etat d’Israël n’a pas ratifié le Statut de Rome.

Pour l’ensemble des motifs de fait et de droit ci-dessus exposés,

l'Union  juive française pour la paix et l'Alternative Information Center demandent qu’il plaise au procureur à la Cour pénale internationale;

-          de recevoir la présente communication

-          de procéder à un examen préliminaire des informations exposées

-          de demander l’autorisation à la Chambre préliminaire de mener une enquête sur les crimes commis au Liban.

 

Pour l'Union  juive française pour la paix,

Pour l'Alternative Information Center,

 

Hugo RUIZ DIAZ BALBUENA                                                                            LEA TSEMEL

 

 

Mireille MENDES-FRANCE

 


 

[1]SG/SM/10580- SC78790UN, Secretary General urges Security Council to condemn Israeli attack on Qana, 30 July,  2006.

[2] Interview de Roland Huguenin, porte-parole du CICR, Four Corners, Australian Broadcasting Corporation, 18 septembre  2006.

[3] Nations Unies - Conseil de sécurité,  Protection des civils dans les conflits armés, S/RES/1738, 23 décembre 2006, § 3.

[4] CIJ, Recueil 1996, p. 257.

[5] CIJ, Recueil, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, 8 juillet 1996, § 78.

[6] Pour rappel, la quatrième Convention de Genève a été ratifiée par Israël le 6 juillet 1951.

[7] Pictet,J., Commentary on the Additional Protocols of 8 June 1977 to the Geneva Convention of 12 August 1949, Geneva, ICRC, Dordrecht, Martinus Nijhoff, 1987, p. 67. T. D. A.

[8] Non souligné dans le texte.

[9] Comité International de la Croix Rouge, Les Conventions de Genève, Commentaire IV, La Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, sous direct. De Jean S. Pictet, Genève, 1956, p. 243.

[10] La Croix Rouge Internationale s’est montrée alarmée par le nombre de victimes touchées par les actes israéliens ainsi que par le non respect du droit international humanitaire.  ICRC, Press release, Geneva, 30 July 2006.

L’ONG Human Rights Watch, dans un rapport préliminaire sur le massacre de Qana, a déclaré que “ les meurtres à Qana ont été le résultat prévisible des bombardements indiscriminés d’Israel au Liban ». “Israel/Lebanon Qana Death Toll,  28”, HRW Press Release, Beirut, 2 August 2006. Non souligné dans le texte.

 

[11] Amnesty International, Op. cit.

[12] La Haye, 18 octobre 1907.

[13] La Convention concernant le bombardement par des forces navales en temps de guerre conclue à La Haye le 18 octobre 1907 - applicable aux conflits armés et au cas d’espèce- établit clairement qu’il « …est interdit de bombarder, par des forces navales, des ports, villes, villages, habitations ou bâtiments, qui ne sont pas défendus ». (article 1). 

L’article  5 dispose que dans « le bombardement par des forces navales, toutes les mesures nécessaires doivent être prises par le commandant pour épargner, autant que possible, les édifices consacrés aux cultes, aux arts, aux sciences et à la bienfaisance, les monuments historiques, les hôpitaux et les lieux de rassemblement de malades ou de blessés, à condition qu’ils ne soient pas employés en même temps à un but militaire ».

[14] Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, CIJ, Recueil, 1996, § 80.

[15] Sur ce point,  le Tribunal Militaire International de Nüremberg a déclaré en 1946:

que "Les Règles à propos de la guerre terrestre contenues dans la Convention réalisaient certes un progrès du Droit international. ... En 1939, ces règles, contenues dans la Convention, furent admises par tous les Etats civilisés et regardées par eux comme l'expression codifiée des lois et coutumes de la guerre... ". Procès des Grands Criminels de Guerre devant le Tribunal Militaire International, Nüremberg 14 novembre -1 octobre 1946. En 1948, le Tribunal Militaire International d'Extrême-Orient exprima la même opinion. En outre, les règles incorporées dans le Règlement furent partiellement réaffirmées et développées par les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949, adoptés en 1977.

[16] Article Premier.

[17] Article 4.1

[18] Non souligné dans le texte.

[19] Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, CIJ, Recueil, 1996, §  32.

[20] Article premier, Session de Strasbourg, 1997, L’environnement.

 

[21] Genève le 10 octobre 1980.

 

[22] Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, CIJ, Recueil, 1996, § 31.

[23] Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, CIJ, Recueil, 1996, § 3O.

[24] Cf.  http://www.msnbc.msn.com/id/13827858/, reproduit par Amnesty International, Amnesty International, Israël–Liban, Des attaques disproportionnées: les civils, premières victimes de la guerre, 21 novembre 2006, note en bas de page, numéro 18.

[25] CNN, ” “Israel authorizes ‘severe’ response to abductions”,  12 juillet 2006.

[26] SG/SM/10580- SC78790UN, Secretary General urges Security Council to condemn Israeli attack on Qana, 30 July, 2006.

 

[27] ONU, Conseil des Droits de l’homme, Deuxième session extraordinaire,

A/HRC/S-2/L.1, 11 août 2006, § 2. 

 

[28] CNN, ” “Israel authorizes ‘severe’ response to abductions”,  12 juillet 2006.

[29] CNN, ” “Israel authorizes ‘severe’ response to abductions”,  12 juillet 2006.

[30] CNN, ” “Israel authorizes ‘severe’ response to abductions”,  12 juillet 2006.

[31] Cf.  http://www.msnbc.msn.com/id/13827858/, reproduit par Amnesty International, Amnesty International, Israël–Liban, Des attaques disproportionnées: les civils, premières victimes de la guerre, 21 novembre 2006, note en bas de page, numéro 18.

[32] CNN, ” “Israel authorizes ‘severe’ response to abductions”,  12 juillet 2006.

[33] « La Cour considère qu'il n'y a rien à redire à l'affirmation du Portugal selon laquelle le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, tel qu'il s'est développé à partir de la Charte et de la pratique de l'organisation des Nations Unies, est un droit opposable erga omnes… ». CIJ, Recueil,  Affaire relative au Timor Oriental, Arrêt du 30 Juin 1995, § 29. 

[34] Arrêt, Op.  cit., § 35.

[35] [35]  Dans l’affaire  Certains intérêts allemands en Haute Silésie Polonaise,  la CPIJ déclarait : “ … un traité ne fait droit qu’entre Etats qui y sont Parties ”.  RSA, 1926, Série A, No. 7, p. 29. Egalement Affaire de l’Ile de Palmes,  RSA, 1928, vol. II, p. 850, CPJI, Affaire de Corélie Orientale RSA, 1923, Série B, No. 5, p. 27-28, CIJ, Incident aérien du 27 juillet 1955 entre la Bulgarie et Israël, Recueil, 1955, p. 138.